Au premier plan, cuirassé France (1912-1922), ce dreadnought jauge 23 000 tonnes et embarque plus de mille marins ; le sous marin Sané (1913-1935) moins de cinquante.
(Coll. E. Miquelon, Marinedk et F. Bouedec)
Du dreadnought au torpilleur numéroté… La guerre sur mer vue à travers le ruban légendé.
Portrait d’un matelot du cuirassé Saint-Louis (1898-1920)
Planche à découper Pro-patria « Armée navale française » éditée vers 1915.
Matelot du croiseur-cuirassé Jules-Ferry (1903-1927) en compagnie d’un sergent du 2e zouaves.
Profil du Léon Gambetta,
tiré de l’ouvrage Les Flottes
de combat 1914, Cdt. de
Ballincourt. Ces bâtiments ont
des équipages de plus de 700
hommes.
Rubans du Jules Ferry et de ses sister-ships : Léon-
Gambetta (1902-1915) et Victor-Hugo (1904-1930).
(Coll. E. Miquelon et F. Bouedec).
Rubans légendés du cuirassé
Bouvet (1897-1902). Ce bâtiment
déjà ancien coule en quelques
minutes le 15 mars 1915 après
avoir heurté une mine dans le
détroit des Dardanelles. Il emporte
avec lui plus de 600 marins.
On remarque ici les trois
polices de caractères
habituelles : de haut en
bas didone, humane
et linéale.
(Coll. E. Miquelon
et Marinedk)
Sous-marins
d’escadre, torpilleur
submersible Silure (1902-1919)
affecté à la station des sousmarins
de Cherbourg en 1914
(légende sans précision du type
de bâtiment conforme au BOM
de 1910) et Torpilleur 249 (1900-
1920), navire type 201 de 40 m
et 86 t affecté à la division des
patrouilleurs de Normandie.
(Coll. E. Miquelon, Marinedk
et F. Bouedec).
Le matelot Jean Ganabroch
du Finistère, embarqué sur le
croiseur Gueydon (1903-1935).
(Extrait de Les Alliés dans la
guerre des nations, 1922)
Ruban légendé du cuirassé Condé
(1904-1933, Mexique, Antilles,
Atlantique), modèle court pour
bonnet ou chapeau de paille, ancres
sérigraphiées en bout de ruban,
opposé au texte par l’organeau. Ce
dispositif est jugé peu pratique pour
adapter le ruban au bonnet, ce qui
entraîne son remplacement par le
modèle à ancres opposées par le
diamant, modification bien antérieure
à la guerre. Ruban du croiseur
Kersaint (1898-1919 Pacifique, Mer
de Chine, Mer du Japon).
Matelot du Kersaint en tenue de descente à terre.
(Reconstitution)
Aéronautique :
Aérostation maritime (Coll. Marinedk et F. Bouedec)
Rare exemplaire du Pourquoi pas ? IV
(1908-1936, carte postale ci-dessus),
navire polaire du commandant Charcot
et navire-école des chefs de quart
pendant la guerre.
Rubans réglementaires : navire-écoles, navires-hôpitaux, bâtiments de servitude
Extrait de livret de solde et photo du quartiermaître
fourrier Roux embarqué sur le Vinh-Long.
(Coll. F. Bouedec)
Transport-hôpital type Annamite,
le Vinh-Long (1883-1922) et son sister-ship
le Bien-Hoa (1882-1923).
(Coll. E. Miquelon, P. Charbonnier et F. Bouedec)
Transport-hôpital type Annamite,
le Vinh-Long (1883-1922) et son sister-ship
le Bien-Hoa (1882-1923).
(Coll. E. Miquelon, P. Charbonnier et F. Bouedec)
Transport-hôpital type Annamite,
le Vinh-Long (1883-1922) et son sister-ship
le Bien-Hoa (1882-1923).
(Coll. E. Miquelon, P. Charbonnier et F. Bouedec)
Technique et politique
Malgré des effectifs appréciables, la Marine française n’est qu’imparfaitement préparée. Très loin derrière la Royal Navy, elle est désormais également surclassée par la Kaiserliche marine et l’US Navy. Ses navires ont longtemps été mis en chantier à l’unité plutôt qu’en séries, elle ait pris du retard dans la transition vers le dreadnought et commence à peine à opérer celle vers la propulsion au pétrole. (1)
À ce tour d’horizon technique, il convient d’ajouter un mot sur le rôle politique de la Flotte. Le choix des noms de baptême en dit long à ce sujet. Si les très petits bâtiments construits en grand nombre prennent sobrement un numéro dans leur série (Torpilleur N°… ), la République donne volontiers le nom de ses héros aux bâtiments prestigieux : Gambetta, Quinet, Ferry, Renan… Les symboles révolutionnaires ne sont pas en reste : Marseillaise, Patrie, Justice… À l’heure de la revanche, on convoque également les gloires et armes d’Ancien régime inspirées du roman national : Gaulois, Saint-Louis, Jeanne D’arc, Bouvines, Pierrier, Dague… De façon plus traditionnelle, on retrouve aussi les grands marins français : Duguay-Trouin, Suffren, Jean Bart… Dernier exemple de cette fonction « politique », les unités de la classe Kaba lancées pendant la guerre empruntent leurs noms aux populations d’un Empire colonial dont le pays tire troupes, ressources et prestige (Touareg, Bambara…).
Nouvelles unités
Aucune grande unité n’est mise en chantier pendant la guerre, pour au moins deux raisons. D’abord, une partie de la capacité de production des arsenaux est redirigée vers les besoins du front terrestre (fabrication de munitions, armement de batteries fluviales…). Ensuite, les grandes unités coûteuses et embarquant des centaines d’hommes démontrent vite leur vulnérabilité face aux U-Boote. Pour contrer cette menace, de nombreux petits bâtiments sont commandés aux arsenaux français et étrangers (plus de mille en service en 1918). Lutte ASM toujours : l’aviation maritime, créée en 1912, ne compte que 13 appareils en 1914. En 1918, elle en aligne 1 250 auxquels il faut ajouter les 35 dirigeables de l’aérostation maritime.
Navires auxiliaires
Réquisitionnés en vertu de la loi du 2 août 1877 et souvent armés par des équipages de réservistes, des centaines de bateaux sont militarisés. Du modeste chalutier au paquebot de luxe, ils vont servir de remorqueurs, citernes, arraisonneurs, dragueurs de mines, croiseurs auxiliaires, transports de troupes, transports auxiliaires, ravitailleurs en munitions, charbonniers, navires-hopitaux… (2)
Rubans réglementaires : nouvelles unités
Ruban légendé du cuirassé
Gaulois (1898-1916)
Quartier-maître du cuirassé
Justice (1907-1921).
Ruban légendé et carte postale du Touareg (1917-1935) et de son sister-ship le Bambara (1917-1933), torpilleurs de classe Kaba respectivement construits par l’entreprise Mitsubishi à Nagasaki et les arsenaux de Kure au Japon. Ces rubans ayant été cousus sur des bachis sont devenus secs et cassants.
Ruban légendé et carte postale du Touareg (1917-1935) et de son sister-ship le Bambara (1917-1933), torpilleurs de classe Kaba respectivement construits par l’entreprise Mitsubishi à Nagasaki et les arsenaux de Kure au Japon. Ces rubans ayant été cousus sur des bachis sont devenus secs et cassants.
Plus local, profil d’un chasseur de conception française et plaque d’un constructeur du port de Lorient, 1915.
(Coll. Marinedk et F. Bouedec)
Deux rubans Chasseur de
sous-marins, polices de
caractères humane et linéale.
Les chantiers américains et
français livrent plus d’une
centaine de bâtiments sous
cette dénomination (symbole
de coque C + N°) et plusieurs
dizaines de vedettes (V + N°).
Autre origine : le Quentin
Roosevelt (1902-1919), ancien
Boïki, est un torpilleur russe
réfugié à Saïgon après la
révolution et rebaptisé du
nom d’un pilote de l’escadrille
Lafayette mort en combat
aérien.
(Coll. Marinedk et F. Bouedec)
Photo du bâtiment parue dans la presse après son engagement contre un sous-marin.
Ruban légendé lettrage type 1 du patrouilleur auxiliaire Élisabeth-Marie (1915-1919 ou 1915-1941, deux navires homonymes) sur fond de cadre commémoratif d’un vétéran, le matelot Le Marc. Il a servi à bord d’une des 9 Jeanne D’arc (au moins) armées pendant la guerre (croiseur, patrouilleurs auxiliaires, bateau-piège et transports) et du bateau-piège Marguerite VI (ex-cargo danois saisi, 1907-1954).
Cargo Henriette (1913-1917) de la Compagnie Auxiliaire de Navigation.
(Collection Marinedk)
Patrouilleur auxiliaire Surmulet (1915-1940), ruban non réglementaire (le type du navire ne devrait pas précéder le nom du bâtiment). Il s’agit là d’une des nombreuses fantaisies existantes.
(Courtoisie du magasin Le Poilu Paris XV)
Les rubans portant d’autres légendes que le nom d’un bâtiment
Les légendes répertoriées au BOM avant la Grande Guerre sont peu nombreuses. Dans son ouvrage de référence, le CA Schérer (3) en dresse une liste par ordre chronologique à compter de 1853 :
a. Remplace les trois précédentes en 1875.
b. Remplace la précédente en 1903.
Marin au ruban légendé A.M.B.C pour Armement Militaire des Bâtiments de Commerce.
La multiplication des légendes non-répertoriées entraîne un rappel à l’ordre en date du 7 septembre 1910. Muet sur le sujet pendant le conflit, le BOM récapitule les rubans légendés portant le nom des unités autres que les navires de guerre en date du 27 mars 1922 :
Le ruban des Cies de formation de Lorient (R-épertorié) est visible sur le cliché d’époque des marins en rayé.
(Coll. Marinedk et F. Bouedec)
a. Remplace les trois précédentes en 1875.
b. Remplace la précédente en 1903.
Le ruban des Cies de formation de Lorient (R-épertorié) est visible sur le cliché d’époque des marins en rayé.
(Coll. Marinedk et F. Bouedec)
Bonnets N° 2 (sans ancre) avec rubans École Navale montés d’origine en polices mécane et humane (légende répertoriée en 1922).
Ce texte de cadrage est intéressant mais il est loin d’être exhaustif. On rencontre en effet de nombreuses autres légendes, une pratique ayant déjà motivé un rappel à l’ordre en 1910.
Photo d’un marin breveté portant le ruban "Aviation maritime"
(Coll. Marinedk et F. Bouedec)
Aéronautique : Aviation Maritime (R) (Coll. Marinedk et F. Bouedec)
Aéronautique :
Aérostation maritime (Coll. Marinedk et F. Bouedec)
Flotilles :
Patrouilleurs de la Méditerranée (Collection Marinedk)
Flotilles : torpilleurs de Toulon.
(Collection Marinedk)
Ce texte de cadrage est intéressant mais il est loin d’être exhaustif. On rencontre en effet de nombreuses autres légendes, une pratique ayant déjà motivé un rappel à l’ordre en 1910.
Fusiliers-Marins
– 1er Régiment de marins, ruban et à gauche, photo prise en 1915
– 2e Régiment de marins,
– 1er Bataillon du 2e Régiment de marins
– Fusiliers-marins.
Cette dernière légende succède aux précédentes après la dissolution du régiment en décembre 1915.
(Coll. E. Miquelon et Marinedk)
NB. Pour les troupes à terre, on observe également les légendes Cie de mitrailleurs, Rgt de canonniers etc. Toutefois, les fusiliers-marins embarqués portent le ruban de leur navire d’affectation (voir exemple du Bayard, Militaria Magazine 416). Le BOM de 1922 ne répertorie aucune de ces légendes.
Spécialités
Variantes de rubans TSF (Non-répertorié-NR)
avec foudres.
(Collection Marinedk)
Artificiers (Non-répertorié-NR), motifs de grenades.
(Collection Marinedk)
Stations lointaines
Trois rubans exotiques : Marine à Dakar, (R) et Station locale du Sénégal (NR).
Trois rubans exotiques : Marine à Dakar, (R) et Station locale du Sénégal (NR).
Autres unités administratives…
Équipages de la flotte (NR) sur bonnet N°1 (avec ancre) et photo du propriétaire du bonnet.
Équipages de la flotte (NR) sur bonnet N°1 (avec ancre) et photo du propriétaire du bonnet.
Les fabrications de fantaisie
Thème de collection à lui seul, le ruban de fantaisie est une confection privée s’écartant du règlement. La variation est parfois très discrète (tissu moiré de qualité supérieure, ancres non conformes…) mais certains exemplaires sont importables (largeur exagérée du ruban, couleurs vives, légende fantaisiste…). Le modèle le plus populaire semble avoir été celui à bouts flottants puisqu’il continue à être fabriqué bien après sa disparition officielle en 1891. La mode des canotiers civils explique sans doute en partie cette production. Ces rubans non réglementaires ont pu être destinés à célébrer un événement du bord (dates apposées sur certains exemplaires) mais ils sont sans doute le plus souvent dus à des initiatives personnelles : souvenir, cadeau, ou volonté de se singulariser à terre, une fois passée l’inspection des permissionnaires…
(A suivre)
Autres unités administratives... : Atelier Central de la Flotte, ruban (R).
(Collection Marinedk)
Autres unités administratives... : Atelier Central de la Flotte, ruban (R).
(Collection Marinedk)
Autres unités administratives... : Atelier Central de la Flotte, ruban (R).
(Collection Marinedk)
Autres unités administratives... : photo datée du 4 janvier 1914 (Collection Marinedk)
Quelques fantaisies :
De haut en bas, croiseur protégé Descartes (1897-1920), croiseur cuirassé Kléber (1902-1917), patrouilleur ou dragueur auxiliaire Goëland (plusieurs navires de ce nom), croiseur cuirassé Desaix (1902-1920), croiseur Guichen (1899-1921), cuirassé Dévastation (1879-1922), cuirassé Patrie (1907-1936) et légende non répertoriée Toulon sans ancre et dans une police de caractères inhabituelle, identique à celle de la photo d’époque ci-dessus.
Photos de détails : extrémités de deux rubans surdimensionnés, cuirassés Jauréguiberry (1897-1920) et Patrie, le premier de teinte rosée en largeur 50 mm et date du 11 juillet 1905 et le second (largeur 47 mm) avec ancre surchargée d’une bouée.
Photos de détails : extrémités de deux rubans surdimensionnés, cuirassés Jauréguiberry (1897-1920) et Patrie, le premier de teinte rosée en largeur 50 mm et date du 11 juillet 1905 et le second (largeur 47 mm) avec ancre surchargée d’une bouée.
Remerciements pour l’aide apportée à la rédaction de cet article : Leewen Y-Honh-Nié (reconstitution), personnel du SHD Lorient, magasin Le Poilu, P. Charbonnier, E. Miquelon, F. Bachmann, et tout particulièrement au webmestre du site marinedk (marinedk@free.fr)
1. CA Boivin S. (ouvrage collectif sous la direction de) La marine dans la Grande guerre, CESM, Paris 2018.
2. Saibène M. La marine marchande française 1914-1918 (L’approvisionnement de la métropole et des armées en guerre), Marine Éditions, 2011.
3. Schérer E. (CA) Équipages et fonctionnaires de la marine (corps et uniformes 1830-1940), B. Giovanangeli éditeur, 2017, et Bulletin Officiel de la Marine, Service Historique de la Défense et http://gallica.bnf.fr